Mercredi, une nouvelle traque à la baleine commence. A
nouveau nous affrétons un petit bateau pour aller sur les spots baleiniers.
Nous n’imaginions pas une sortie aussi sport, à tout point de vue.
Lors de notre dernière sortie, notre bateau faisait 5 à 6
mètres pour presque deux de large. Cette fois nous sommes sur une coquille de
noix de 3 mètres à peine et de 1,20 mètre de large. Et ça change tout !
Surtout en mer avec des creux de 2 à 3 mètres. Nous sommes tout de suite mis au
parfum, si l’on peut dire ça comme ça… Après 3 minutes de bateau, Laure et déjà
plus trempée qu’à sa naissance. Son pantacourt affiche deux petits centimètres
qui ne sont pas encore mouillés, mais qui le deviendront très vite. Elle est du
mauvais côté du bateau, et se prend des paquets de flotte impressionnant, elle
va même boire la tasse alors qu’elle n’est pas dans l’eau. Pour nous deux,
épargné dans un premier temps, nous allons aussi subir le même sort. Pourtant à
ce moment-là nous sommes à deux cents mètres de la côte et encore bien à l’abri
de la houle qui agite le milieu de la baie.
À dix kilomètres de notre point de départ, totalement
trempé, le bateau pique sur le large. Nous sommes si ridiculement petits au
milieu de cette mer agitée. En règle générale nous avons face à nous des creux
de un à deux mètres. Là par moment, c’est des murs de trois mètres d’eau qui
nous prennent de face dans le meilleur des cas, et sur le côté dans le
pire. En principe l’équipage de deux
hommes, fait face, mais à quelques reprises, force est de constater que
l’équipage ne maitrisait pas grand-chose et que la mer nous faisait une fleur
en nous laissant sur elle. Car si le choc de monter de face sur une vague et de
retomber de l’autre côté, est violent, il est de peu de risque tant que la
proue ne s’enfonce pas dans l’eau. Par contre lorsque que cela vous prend de
côté, le chavirage est alors tout à fait possible. La pire des choses dans ce
type de mer avec un si petit bateau, étant la panne moteur ! Ballotté par
les flots, nous scrutons pour trouver de la baleine. Presque 40 minutes sans
rien, et quarante minutes qui semblent une éternité. Les filles s’impatientent,
mais la nature est ainsi faite. Nous sommes des chasseurs en pleine traque, et
notre gibier n’a pas forcément envie de nous voir. De plus nous prenons de plus
trois à moins trois mètres à chaque vague, inutile de vous dire qu’au sommet de
celle-ci c’est le top pour voir l’horizon et détecter de la baleine. Mais dans
son creux, rien à voir qu’un mur d’eau de chaque côté.
Après une longue traque décevante, nous approchons de deux
gros bateaux qui sont sur quelque chose.
Elles sont trois. Une famille au complet, soit le mâle, la
femelle et son baleineau. Les deux adultes sont paisibles et l’on voit par
moment les évents et leurs immenses queues. À Quelques reprises le petit sort
la tête de l’eau, jusqu’à l’œil. Il est au moins aussi curieux de nous voir que
nous de l’approcher.
Il doit se demander ce que ça peut bien être que ces drôles
de gros poissons flottants. Sa curiosité et la fougue de son jeune âge lui
donne envie d’un petit salto juste entre nos bateaux. Timide saut, ou il
sortira à deux tiers pour retomber dans une grande gerbe d’eau.
Mais ce petit comique n’en a pas fini avec nous et nous
réserve encore une belle surprise. Du genre qui vous file les frissons rien que
d’y penser ou de le raconter comme je le fait à l’instant.
Après son saut, il plonge et passe sous notre bateau. On
voit bien son corps noir et son ventre blanc tout comme ses grandes nageoires.
Papa et maman suivent de près, et nous avons donc trois baleines qui ont passé
juste au-dessous de nous, plus profond pour les parents. Alors que nous
distinguons les formes des deux adultes, le petit nous balance a surprise,
comme un signe d’au revoir avant de continuer sa route avec ses parents. Son
salut sera juste devant notre bateau à trois mètres à peine… un saut magnifique
pour nous montrer à quel point il est beau ! Son corps entier jaillit de
l’eau, il doit faire 5 mètres environ et peser de 3 à 5 tonnes. Le lait ultra
riche de la mère fait des miracles et sa survie en dépend, dans un mois et
demi, il devra faire 6 à 8 tonnes pour remonter entre 4 et 6 milles kilomètres
vers le nord entre le Canada et le Groenland. Pour l’instant il est là devant
nous et nous salue de son majestueux saut. Une gerbe d’eau et le corps
disparait dans les eaux de la baie. Pour tous les trois, nous avons des petites
étoiles dans les yeux, il nous faut un peu de temps pour réaliser ce que nous
venons de voir. Nous sommes un peu sur un petit nuage heureux et conscient de
la chance que nous avons eu d’assister au plus beau des spectacles qui soit…
celui de la nature libre et sauvage.
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